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Loger sa famille. La mettre à l’abri dans une maison individuelle. C’est ce vieux rêve de tous les Français que Jean Prouvé réalise en 1954 pour sa femme et ses enfants. Jean Prouvé, né en 1900, un ingénieur autodidacte, architecte sans diplôme, Le Corbusier dit de lui C’est le type même du constructeur. C’est d’abord un manuel. Dans les années 20, il fait son apprentissage comme forgeron d’art. Passionné d’innovation, il crée rapidement son propre atelier où il se met à travailler la tôle dont il fait du mobilier ou des éléments métalliques de construction pour des architectes d’avant garde.

LA Maison Jean Prouvé

Après la Seconde Guerre mondiale, l’atelier devient usine, Prouvé entouré d’une équipe de collaborateurs, il conçoit des prototypes de maisons individuelles préfabriquées destinées à la production en série. Ces maisons usinées, qui peuvent être montés par deux ou trois personnes en une seule journée, doivent répondre à l’énorme crise de logement que connaît le pays après la Seconde Guerre mondiale. Mais aucun de ces prototypes ne débouchent sur de véritables commandes. La France de la pierre et du béton trouve trop moderne, trop simple.

LA Maison Jean Prouvé

Ce qu’on appelle alors dédaigneusement des machines à habiter. En 1952, un grand industriel de l’aluminium matériaux innovants que Prouvé utilise de plus en plus, investit dans l’usine mais, rapidement Prouvé, se voit mise à l’écart. En 1953, il demande à une de ses filles d’aller une dernière fois photographier les ateliers de l’usine à Maxéville, dans la banlieue de Nancy. Ces images, c’est désormais tout ce qui lui reste de l’outil qu’il avait créé et dont il vient d’être chassé par le nouvel actionnaire.

La famille Prouvé possède sur les hauteurs de Nancy un terrain, probablement un ancien vignoble réputé inconstructible à cause de sa très forte pente. La maison est construite sur une étroite terrasse aménagée tout en haut du terrain.

LA Maison Jean Prouvé

Elle n’est accessible qu’à pied. Une erreur de jeunesse, dira Prouvé plus tard. Bâtie sur un sol de mauvaise qualité, sablonneux et inconsistant, la maison doit se faire aussi légère que possible, tant par ses matériaux que par ses dimensions. Elle n’a qu’un seul étage, mais comme le dit Mme Prouvé qui, une fois arrivé là haut, aurait encore envie de monter. L’étroitesse de la terrasse impose une maison tout en longueur. L’arrière est adossé à la pente, l’avant s’ouvre largement sur le paysage de la ville au sud.

Le programme, et le programme minimum d’une maison de famille, des chambres à coucher pour les enfants, et les parents, une salle de bain, un grand séjour et ce que prouvé appellent des pièces techniques cuisine et buanderie. Le plan est strictement linéaire, les espaces des chambres de la salle de bain, du séjour et de la cuisine sont simplement posés les uns à côté des autres. Toutes les fenêtres donnent sur le devant. A l’exception de cette petite ouverture percée dans l’axe de l’unique couloir qui relie entre elles toutes les pièces de la maison.

Le couloir est entièrement bordé de placards 27 mètres de rangement, c’est ce qu’il faut pour une grande famille précise, Prouvé chaque fois qu’il fait visiter les lieux.

Mais à l’intérieur des placards se cache l’ossature même de la maison. Une fois fini les travaux de terrassement et d’aménagement du terrain, la maison elle même est montée en quelques week end comme il se doit pour une maison Prouvé.

Toute la famille s’y met avec l’aide de quelques fidèles amis et ouvriers. Mais la perte de son usine oblige Prouvé à renoncer à la structure initialement prévue. Il est obligé d’improviser, de se débrouiller avec les moyens du bord. Posés à même le sol, des poutrelles métalliques espacées de deux mètres forment l’armature du plancher à l’arrière des poutrelles.

Côté pente sont boulonnés des éclairs de tôle fabriquées par le serrurier du coin. Poutrelles et équerre forment l’ossature de la maison. Sur les poutrelles, on coule une dalle de béton dans laquelle est intégrée un chauffage par le sol deux murs en pierre à chaque extrémité stabilise l’ensemble. À l’arrière, la maison est fermée par une simple cloison de bois fixée au équerre métalliques, qui servent en même temps de partition pour des placards. Un bloc sanitaire monté en brique est le dernier élément de maçonnerie.

Toute la façade avant est constituée uniquement de pièces préfabriquées que Prouvé avait conçu pour ses autres projets et qu’il a réussi à récupérer dans les stocks de son ancienne usine.

J’ai fait ma maison avec des restes, dit il, des restes comme ces panneaux de façade conçus à l’origine pour des maisons d’urgence destinées aux réfugiés des régions sinistrées de la Seconde Guerre mondiale. Les panneaux équipés de fenêtres à guillotine et de volets métalliques incorporés font un mètre de large, un mètre. C’est le module de base de toutes les maisons de Prouvé qu’il juge aberrant le module de 30 centimètres imposé par les règlements de l’époque.

Un mètre, c’est plus pratique et plus facile pour compter. Neuf panneaux neuf mètres boulonné côte à côte sur un fer de bordure forment la façade des chambres subdivisées à l’intérieur par de simples cloisons de bois.

L’économie d’espace est maximale, les enfants ont droit à deux panneaux, ce qui fait une chambre de deux mètres de large sur trois de long. l’Espace nécessaire est suffisant selon Prouvé, pour mettre un lit, une table, une chaise, une bibliothèque.

Un écolier n’a pas besoin de plus, la même économie spartiate vaut pour la chambre des parents, Trois panneaux de façade, trois mètres. Une chambre de neuf mètres carrés, le strict minimum justifié par l’exiguïté du terrain.

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